Que faire pour des personnes dans le besoin d’une oreille attentive ou d’un guide de l’ombre montrant le chemin ? Une solution : Fil Santé Jeunes. Ce sont des professionnels de santé au bout du téléphone, prêts à venir en aide à des jeunes de 12 à 25 ans. Depuis 30 ans, ils œuvrent 7 jours sur 7, de 9h à 23h pour la santé mentale de la jeunesse, pour répondre aux doutes qu’elle traverse et remettre les liens humains au cœur des solutions d’aujourd’hui.
Elle est de ceux qui apaisent, qui prennent le temps et écoutent le mal-être. Elle est de ceux qui orientent ces jeunes qui ont perdu leurs repères, qui se questionnent et qui sont en quête d’anonymat, de tranquillité et de non-jugement. Elle est la ligne d’écoute gratuite des jeunes. Elle, c’est Fil Santé Jeunes et elle existe depuis plus de 30 ans pour les 12-25 ans.
Repères ¤ En 2025, 1 jeune sur 4 souffre de dépression. ¤ 94% des jeunes se disent inquiets pour au moins un enjeu majeur : leur avenir personnel (68%), l’actualité internationale (83%) ou la crise environnementale (77%). ¤ Seuls 37% des jeunes âgés de 18 à 24 ans déclarent qu’il est facile pour eux de parler de leurs problèmes de santé mentale (IPSOS-CESI, 2025). |
La jeunesse : se construire en affrontant ses insécurités
Ce dispositif de prévention se décline sous différentes formes : chat individuel, ligne téléphonique, forum entre pairs avec modérateurs, publications variées apportant des éclairages sur la santé et les difficultés rencontrées par les jeunes. La palette de thèmes abordés est elle aussi très large. Le mal-être est présent dans la majorité des conversations (60 %). Mais d’autres sujets reviennent aussi : la sexualité, la contraception, la recherche d’emploi ou encore la gestion des relations amoureuses. Autant de préoccupations qui poussent les jeunes à solliciter un professionnel pour en parler.
La réorientation est au cœur du dispositif. Les jeunes sont écoutés et guidés vers d’autres spécialistes à même de répondre précisément à leurs questionnements. Il peut s’agir d’une mission locale, de la police, d’un docteur… C’est d’ailleurs ce que nous retenons de notre échange avec Bruno Verrecchia, responsable du service de téléphonie sociale. « Notre rôle c’est d’ouvrir un espace sécurisant mais on ne se substitue pas aux professionnels de terrain. On est une passerelle, on permet « d’aller vers » ceux qui pourront les aider », explique-t-il. En ce sens, ils n’assurent pas de suivi régulier mais répondent à une demande occasionnelle.
« On est une passerelle, on permet « d’aller vers » ceux qui pourront les aider. » Bruno Verrecchia
S’il y a autant d’appels que de besoins, les motivations, elles, semblent quasi systématiquement les mêmes. En effet, ce qui est avant tout recherché, c’est la promesse de l’anonymat. Pouvoir poser sa question et aborder une problématique sans que cela ait de conséquences immédiates. C’est pouvoir se livrer sans mettre en jeu la perception que les autres ont de nous et le regard que nous posons sur notre propre personne.
L’âge ainsi que les situations familiales, scolaires et relationnelles sont tout de même précisés pour faciliter le conseil des professionnels à l’écoute. Et parfois, une levée d’anonymat peut être appliquée, avec l’accord du jeune. Ces situations sont rares. Elles apparaissent lorsque le jeune est confronté à un danger avéré qui requiert l’appel aux secours ou aux pompiers.
Une activité qui se développe pour d’autres publics
Fil Santé Jeunes est un programme de l’Ecole des Parents et des Educateurs (EPE). L’association se découpe en trois pôles – parentalité, jeunesse et formation – et détient deux lignes téléphoniques : Fil Santé Jeunes et la ligne Inter Service Parents. Cette division permet de bien séparer les besoins et les écoutes des parents et des jeunes.
Ainsi, sur la première ligne d’écoute, les jeunes sont entendus seuls, sans accompagnement d’un parent, d’un proche ou d’un enseignant. Dans certains cas, comme le harcèlement scolaire, le jeune et ses parents sont reçus – bien que séparément. Cela permet d’offrir aux parents des clés de compréhension et d’action, tout en répondant à leur sentiment d’impuissance.
La deuxième ligne d’écoute, dédiée aux parents, se concentre sur leurs demandes, les soucis du quotidien en tant que parents… Cependant, pour le moment, elle ne répond qu’aux parents franciliens.
Par ailleurs, pour apporter un regard d’expert, une enquête de terrain est menée par l’équipe d’une trentaine de professionnels – psychologues spécialisés, psychothérapeutes, psychomotriciennes, assistantes sociales. Elle sert à l’élaboration de politiques publiques en faveur de la santé de la jeunesse.
Les résultats de ces recherches annuelles sont des outils précieux pour l’action quotidienne de l’opérateur public Santé publique France. L’enquête de 2025, La sexualité, tu en penses quoi ?[1], avait déjà permis de mettre en évidence des chiffres frappants concernant les violences sexuelles : 29% des répondants ont déjà été forcés à des attouchements sexuels au cours de leur vie et 14% ont déjà été forcés à avoir des rapports sexuels contre leur volonté.
L’enquête 2026, dont le sondage est encore en cours, porte sur la violence sous toutes ses formes.
La demande évolue mais jamais ne décroît
Aujourd’hui, de plus en plus de jeunes préfèrent le chat aux appels. Le besoin reste le même mais c’est la temporalité qui diffère. La question peut être plus cadrée et les mots choisis avec soin pour avoir l’impression de « garder le contrôle ». La réponse, elle, doit aller au concret, à l’essentiel, au plus rapide. Le média The Conversation parle d’une transformation profonde des usages et des normes de communication numérique qui est plus orientée vers les messages que les appels.
Sur le premier trimestre de 2025, Fil Santé Jeunes a reçu 69 000 appels et chats pour 17 000 demandes traitées (30% des appels et 50% des chats). Ce numéro national[2] est présent sur les territoires d’outre-mer et les pays francophones. Il répond à une demande bien plus grande que ses capacités réelles.
Depuis la crise du Covid-19, la santé mentale a pris une place prépondérante sur la scène médiatique. Désignée Grande Cause nationale en 2025, elle est au cœur de toutes les attentions. Déstigmatisation, développement de la prévention, amélioration de l’accès aux soins, accompagnement des personnes concernées… Une attention particulière pour des résultats cependant encore en deçà des attendus. Pour y répondre, VersLeHaut s’est aussi penché sur la question notamment sous le prisme de la confiance des jeunes en eux, les autres et l’avenir dont l’étude est sortie en juin dernier.
Agathe Olory
[1] Enquête menée auprès de 1097 participants.
[2] Joignable au 0800-235-236