Le quotidien 20Minutes a interrogé Marc Vannesson, Délégué Général de VersLeHaut sur ce qu’il pensait de la possibilité d’organiser lors du déconfinement les cours à l’extérieur des salles de classe. Serait-ce l’occasion de développer cette pratique déjà mise en œuvre dans de nombreux pays, comme le Danemark ou l’Allemagne ?

Extrait :

Et si c’était une solution pour le retour à l’école lors du déconfinement ? Dans une tribune publiée dans Le Monde, chercheurs, enseignants et formateurs suggèrent d’organiser les cours à l’extérieur des salles de classe. « Parmi les quelque 16 millions d’enfants et leurs parents, et le million de professeurs, beaucoup ne semblent pas avoir envie de retourner dans des salles closes, autant nids à microbes que continuité du confinement », écrivent-ils.

Une solution qu’a déjà adoptée le Danemark pour le retour de ses élèves à l’école. « Ce pays pratiquait déjà les enseignements en extérieur et a décidé de les développer lors du déconfinement », observe Marc Vannesson, délégué général de VersLeHaut, think tank dédié à l’éducation. Certains pays comme l’Ecosse ou l’Allemagne sont aussi très en avance sur le sujet. « Depuis 2010, le ministère de l’Education écossais forme même ses professeurs à l’enseignement dehors et a intégré l’apprentissage à l’extérieur au programme officiel », explique Crystèle Ferjou, une des pionnières de la classe dehors en France, qu’elle a expérimentée en 2010 lorsqu’elle était enseignante en maternelle à Pompaire (Nouvelle-Aquitaine). La France, elle, est plus à la traîne sur le sujet. « Mais plusieurs centaines d’enseignants français pratiquent déjà la classe dehors. Et pas uniquement dans les zones rurales. Car dans les grandes villes, il est possible d’emmener les élèves au parc ou dans une cour végétalisée », précise Moïna Fauchier-Delavigne, coautrice de L’enfant dans la nature (ed. Fayard, 2019).

Un gain de bien-être pour les élèves

Et si la mayonnaise prend peu à peu en Europe, c’est que l’enseignement en plein air est paré de mille vertus par ses adeptes. D’abord pour ses bienfaits pour la santé des élèves « Plusieurs études internationales ont montré que cela permet aux enfants de renforcer leur système immunitaire. Le fait d’être au contact du vent, de l’air, de l’eau procure une sensation de bien-être et diminue le stress. C’est d’autant plus important après le confinement. Les enfants ont besoin de mouvement », assure Crystèle Ferjou.

Pour Marc Vannesson, si la classe à l’extérieur est promise à un bel avenir en Europe, c’est aussi car elle s’inscrit dans un mouvement de fond de reconnexion avec la nature : « Même en temps normal, le fait que les enfants ne sortent pas assez est un vrai sujet. C’est d’ailleurs une préoccupation des parents qui explique le succès croissant du scoutisme », soutient-il.

« Cela a un effet sur leur concentration »

Et le fait d’être en plein air rendrait les élèves plus disponibles pour les apprentissages : « Plusieurs études montrent que les cours à l’extérieur transforment la relation entre les enseignants et leurs élèves. Car changer de cadre scolaire modifie la posture de chacun et renforce la motivation des élèves », indique Marc Vannesson. « Cela a un effet sur leur concentration, car leurs réserves d’attention se régénèrent via le contact avec la nature », complète Moïna Fauchier-Delavigne.

L’intérêt pédagogique de la classe dehors ne serait plus à démontrer non plus, selon Crystèle Ferjou. « Les enseignants peuvent utiliser la nature pour des activités pédagogiques. Et cela permet de développer les capacités motrices des élèves, leur coopération, leur imaginaire… ». « Cela renforce leur conscience environnementale ; au contact du vivant, ils ont l’impression de faire un tout avec la nature, ce qui les pousse à en prendre soin », ajoute Moïna Fauchier-Delavigne.

« Faire classe dehors aurait un effet moins anxiogène pour tout le monde »

Reste à savoir si les directions académiques donneraient leur aval à ce type d’initiatives en pleine crise sanitaire, quand la communauté éducative est déjà pétrie d’inquiétudes. Les signataires de la tribune estiment qu’elles y auraient intérêt : « Les établissements scolaires ne disposent souvent pas d’espaces suffisants à l’intérieur pour permettre le respect des distances minimales recommandées. Les classes et les espaces de circulation sont trop exigus et entraînent des densités moyennes élevées et des situations de promiscuité », écrivent-ils.

« Faire classe dehors aurait un effet moins anxiogène pour tout le monde. Et le fait de ne pas utiliser de mobilier scolaire diminue les risques de contagion », insiste Moïna Fauchier-Delavigne. Quant à savoir où ces séances de travail pourraient avoir lieu, la tribune suggère des jardins, parcs, stades, terrains de football, forêts… Mais d’une part, pour les établissements situés dans les territoires en « zone rouge » vis-à-vis de l’épidémie, ce ne sera pas possible. Et d’autre part, « pour que cela fonctionne, il faut une vraie adhésion des parents et de toute l’équipe pédagogique », souligne Marc Vannesson. Pas évident que leur blanc-seing soit facile à obtenir en ce moment…

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