Dans cette deuxième chronique réalisée en partenariat avec l’application ludo-éducative Bayamnous répondons aux questions que vous pouvez vous poser en lien avec l’éducation de vos enfants, élèves, petits-enfants… Cette semaine, Bérengère Wallaert nous parle de la gestion des conflits au sein des famille. Est-ce normal de disputer ? Comment se parler sans se crier dessus ?

Oui, c’est normal de se disputer !

Dans une famille qui va bien, on se chamaille.  C’est normal et même ça a du bon : quand on se dispute, on communique !

On exprime ses émotions, d’abord, et aussi certaines choses qui n’avaient pas pu se dire dans le calme. Si les disputes sont parfois utiles à une bonne communication, l’harmonie reste quand même bien plus agréable à vivre pour tout le monde. Les parents peuvent avoir un rôle actif pour réguler les tensions au sein de la famille.

Pour éviter la violence, dans la famille comme dans n’importe quel groupe humain, il y a deux façons de faire : se soumettre à une loi, ou tenir compte des autres. Les parents travaillent sur les deux fronts : ils édictent les règles, et ils aident l’enfant à développer “ toutes les capacités qui [le] préparent à vivre en harmonie lucide et intelligente avec les autres »[1].

Gérer les conflits pour se parler sans s’entretuer

Gérer les conflits avec son enfant, ou dans la fratrie, n’est pas si différent de ce qu’on rencontre dans le travail. De nombreuses techniques ont été éprouvées, appelées « gestion de conflit ». Son principe est simple : permettre aux personnes qui s’opposent d’exprimer leurs ressentis et leurs besoins, tout en envisageant la position de l’autre.

Dans certaines écoles[2], ces techniques sont enseignées aux enfants pour régler leurs différends entre enfants. Des petits « médiateurs » sont formés à chaque niveau à partir du CP et accompagnés par des enseignants ayant eux-mêmes suivi une formation. Dans la cour, ils sont identifiés par un surgilet de couleur.

D’abord être en paix avec soi-même

Et l’éducation peut y contribuer. Une éducation respectueuse et chaleureuse, qui permet à l’enfant d’être lui-même et d’avoir confiance en lui, c’est la base d’une bonne construction. Un enfant confiant et serein aura moins tendance à être déstabilisé par l’environnement extérieur, par exemple il sera moins enclin à réagir à une provocation par l’agressivité. En revanche, quand les enfants traversent des épreuves et des humiliations très tôt dans leur vie, cela perturbe cette solidification[3].

Cette priorité donnée à la construction apaisée de l’enfant imprègne l’ensemble des pédagogies « non-violentes » ou « bienveillantes »[4].

Avoir un calme intérieur

Pour aider l’enfant à faire face à l’adversité (par exemple quand il voit des scènes violentes sur les écrans, ou avec les copains, à l’école…) et à y répondre de façon adaptée, la meilleure armure que l’on puisse lui donner est invisible, c’est une posture intérieure. Les recherches de Jean-Philippe Lachaux[5] ont montré que le calme intérieur aidait à la concentration, la mémorisation…d’où un engouement bien mérité pour la méditation proposée aux enfants, comme la méthode « Calme et attentif comme une grenouille »[6]. Ces techniques appellent aussi au silence, ce qui est devenu très difficile avec nos écrans… et donc particulièrement utile ! Et ce calme intérieur, en plus d’être un appui à la réussite scolaire, permet d’être plus fort en profondeur.

Faire la paix en famille ou à l’école, c’est d’abord une démarche intérieure, pour l’adulte qui apprend à communiquer autrement, pour l’enfant qui déploie ses compétences. C’est un chemin individuel, très gratifiant, mais c’est aussi une avancée collective : l’enfant qui apprend le bénéfice de la paix sera probablement un adulte qui œuvrera pour la paix.

Alors pour avoir la paix dans le monde, commençons par faire la paix chez nous…

 

[1] Selon la formule d’Olivier Maurel, fondateur de l’Observatoire de la Violences Educatives Ordinaires

[2] Par exemple l’école primaire Victor Hugo à Colombes (92).

[3] C’est pourquoi l’éducation « à la dure », c’est-à-dire qui confronte tôt les enfants à des situations difficiles, loin de rendre les enfants forts, les fragilise et les mène vers la violence.

[4] Telles que la méthode « Faber et Mazlish », née aux Etats-Unis dans les années 80, qui s’étend en France depuis une quinzaine d’années.

[5] Entre autres ouvrages : « Le cerveau funambule », Odile Jacob, 2015

[6] Eline Snel, Les Arènes, 2017